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CHEVASSUS, R.


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Référence: 303

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L'hypothèse des quanta exige seulement que dans les lois élémentaires régissant les forces atomiques, il existe implicitement certaines discontinuités qui auront ensuite pour conséquence les régions discontinues de probabilité. Quant à la nature de ces discontinuités, il n'est pas présentement possible d'en rien dire : il faut remarquer spécialement que la structure en quanta ne se rapporte pas immédiatement à l'énergie, mais à la probabilité. On ne peut, d'une façon absolue, parler de quanta d'énergie que dans les phénomènes périodiques. Selon moi, on tiendra complètement compte de l'hypothèse des quanta si dans un oscillateur moléculaire à vibration périodique on regarde seulement l'émission de l'énergie comme gouvernée par les quanta, et au contraire l'absorption, tout au moins pour la chaleur rayonnante, comme parfaitement continue dans son allure. Pour les phénomènes non périodiques, A. Sommerfeld a récemment tracé les lignes fondamentales d'une théorie des quanta, très hardie et fort intéressante, et dans laquelle ne jouent naturellement un rôle que des quanta d'action sans quanta d'énergie.
Il ne faut pas reprocher à l'hypothèse même des quanta cette chatoyante variété d'opinions. Au contraire: c'est justement quand on examine dans toutes les directions possibles, c'est quand chacun des chercheurs, sans se troubler d'objections qu'il estime sans valeur, poursuit sa propre voie sur des terrains où lui-même se sent le plus assuré, que nous pouvons légitimement espérer voir,se manifester le véritable caractère de l'hypothèse. Ainsi, en effet, en dehors du rayonnement calorifique et de la chaleur spécifique, un grand nombre d'autres phénomènes physiques ont été peu à peu rapprochés de l'hypothèse des quanta: l'effet de Doppler dans les rayons-canaux, l'effet lumineux-électrique, la tension d'ionisation, la production des rayons Rœntgen et des rayons γ avec leur inversion : la mise en liberté de rayons cathodiques secondaires par des rayons Rœntgen, la résistance de conduction électrique, les forces thermo-électriques, la loi de formation des lignes spectrales en série, l'émission des électrons dans les réactions chimiques, – partout, au moins avec quelque bonne volonté, on peut retrouver la trace de la domination encore bien mystérieuse du quantum universel d'action. Et bien plus, le fait remarquable établi par O. Hahn, et ses collaborateurs, qu'une substance radioactive, pourvu qu'elle soit de nature chimique unique, émet des rayons β de vitesses parfaitement déterminées, semble démontrer pour ainsi dire de visu l'émission des quanta.
Le plus gros reste encore à faire, et maint résultat qui semble plein de promesse, tombera encore comme une fleur flétrie de l'arbre de la connaissance: mais l'élan est donné. L'hypothèse des quanta ne disparaîtra plus du monde, car les lois du rayonnement calorifique y veillent déjà. Et je ne crois pas trop m'avancer en exprimant l'opinion, qu'avec cette hypothèse les fondations sont établies pour l'édification d'une théorie destinée à pénétrer un jour les particularités des actions rapides et subtiles du monde moléculaire.
Max PLANCK, Conférence prononcée le 16 décembre 1911 à la Société chimique allemande de Berlin

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